
J’écoute. La mélodie me porte à travers les années. Tant d’années sont passées depuis. Depuis quand? Depuis. Il y’en a plein, des depuis. Depuis le début d’un monde nouveau? Depuis la fin de l’ancien? De quel ancien? Depuis un retour hypothétique qui s’éloigne à mesure que les lendemains s’enchaînent? Depuis un départ qui n’en sera plus un à mesure que les années seront passées? Depuis la fin de l’innocence des choses? Le début de la réalité? Ou le début de sa fin?
Je pense à tous ces depuis en lisant vos mots. Certains me ramènent de quelques mois en arrière. Des depuis que l’oubli n’a pas encore fanés. Certains me ramènent vers des chapitres un peu plus lointains dans la brume des depuis, souvenirs d’une vie passée, d’une époque que vos mots me font revivre avec la douce amertume de la nostalgie. Les amis, le temps passe tellement vite, et cela me fait parfois l’impression que nos vies s’entrecroisent le temps d’une étincelle pour ensuite continuer leurs courses solitaires vers on ne sait quel astre, quelle étoile dont l’illusion nous berce.
Vos mots font chaud au cœur. Vos mots témoignent qu’à la croisée des chemins, nous aurions été plus que des étincelles les uns pour les autres. Nos rencontres auront compté, elles nous auront façonnés en une version plus en couleur que celle d’avant.
Merci d’avoir pris la peine d’écrire, merci de vous être souvenus. Merci de vous être arrêtés deux minutes quand vous aviez croisé ce garçon un peu gauche au détour d’une classe de maternelle, ou ce jeune homme qui essayait de trouver sa place dans ce monde. Merci d’avoir salué, même de loin, ce monsieur qui n’a pas vu le temps passer, et de ne pas lui avoir rappelé que le temps est irréversible.
Merci pour ce bout de chemin que nous avons parcouru ensemble.
A Zahra, Ranim, Peter, Ilda, Mireille, Rony, Nicolas, Richie, Fadi, André, Danielle, Jacques, Edith, Walid, Eliane, Boudy, Wissam, Joëlle, Marcelle, Marielle, Aline, Gerard, Tony, Fouad, Liliane, Edmond, Georges, Joseph, Georges, Katia, Charbel, Mazen, merci pour ce bout de chemin que nous avons parcouru ensemble. Merci d’avoir pensé à moi aujourd’hui.
Quant à vous deux que je ne nomme pas, je ne vous oublie pas, loin de là. Vous vous reconnaitrez dans les lignes qui suivent.
De l’une, je pense à tous ces kilomètres et toutes ces années qui n’auront pas réussi à nous faire oublier les souvenirs d’enfance communs et à cet adieu de la fin des années 80, qui redevient un au revoir de temps en temps.
De l’autre, je pense à ce prénom tellement prémonitoire, puisqu’il est également l’un des prénoms de ce pays de liberté, d’égalité et de fraternité d’où j’écris ces mots une trentaine d’années plus tard. Et si j’écris, c’est en partie parce que tu m’en auras donné le goût, peut-être en cette matinée du milieu des années 90 où tu nous initiais à la poésie. Il y était question d’un ange me semble-t ’il.
Deux depuis qui auront valu la peine d’être vécus.
Chers amis, la musique me berce toujours. Je vous dis donc adieu et vous laisse avec un piano un peu fatigué, la voix un peu éraillée de Thom Yorke & Flea, et la nostalgie pure qui coule entre ces notes. Et je me presse de publier ce texte avant la fin de ce jour.
Plus que quatre minutes avant minuit …
Rabih