Rêve éveillé

Bleu. Rouge. Bleu. Rouge… Un bruit continu, une modulation assourdissante… Des cris, indistincts, paniqués… Le noir, le silence, puis, un plafond blanc qui s’enfuit… des visages qui lui courent après, et du noir, encore…

Je me réveille. 4 heures du matin. Encore un cauchemar me dis-je. J’en ai la gorge sèche. Trop engourdi pour aller à la cuisine, je cherche des yeux quelque chose pour oublier ma soif. Un puzzle m’attire irrésistiblement, la création d’Adam, chapelle Sixtine. 206 pièces.

Pas trop compliqué, ça me prendra une petite heure, le temps de me rappeler au souvenir de ce brave morphée. Je commence par les coins comme tout passionné de puzzle qui se respecte, je m’applique, mais ça n’avance pas. Une horloge tinte dans le lointain, 4h30.

“Résous-le!”

Une voix intérieure résonne dans ma tête, comme une explosion. “Résous ce puzzle!” Un sentiment d’urgence m’envahit soudain. Où avais-je la tête? Il faut conclure au plus vite! Il va où le cubitus? Aurais-je interverti les tibias? Et cette rotule qui ne s’imbrique pas sur ce genou?
Morphée finit par se manifester alors que je pose la dernière pièce du puzzle, celle où l’index du bon Dieu rencontre celui de sa fragile créature. Mes yeux se ferment juste à temps…

Je saurai plus tard à ma sortie du coma que le chirurgien orthopédiste aura fait des miracles sur une grande partie de mes 206 os et que je lui dois de pouvoir me tenir à peu près debout aujourd’hui malgré la gravité de mon accident. Je fais deux bons centimètres de moins à cause de mes tibias passés au moulin et je ne serai jamais champion de course à pied, mais je marche encore et je peux même courir dans mes bons jours grâce à lui également. La rotule est toujours aux abonnés absents, mais heureusement, les cubitus tiennent encore la route. Des miracles je vous dis. Ma moto quant à elle n’est plus qu’un lointain et douloureux souvenir, cédée avec hargne à l’épaviste au poids de ferraille par ma mère, qui depuis garde un cierge allumé à l’intention de son grand garçon à Saint-Sulpice, que Dieu me la garde.

Depuis ce jour, une pensée me hante, celle de la dernière pièce de puzzle où se rejoignent l’humain et le Divin, le mortel et l’Eternel, à travers leurs indexes qui se frôlent. Voyez-vous, de tout mon corps, les os de mes membres supérieurs ont le plus souffert et à un moment de ma jeunesse, j’avais arrêté de compter les opérations qui m’ont finalement permis de pouvoir tenir une fourchette à peu près correctement. Les seuls os à en avoir réchappé sont ceux de mon index gauche, celui-là même que le bon Dieu semble toucher dans la fresque de la chapelle Sixtine. Et j’y ai vu un signe, un appel à utiliser ce rescapé de l’hécatombe pour transmettre le don de vie qui aurait dû m’être refusé.

J’ai donc repris mes études de médecine, abandonnées dans une vie antérieure pour l’amour d’une créature à deux roues et me suis spécialisé dans les greffes, pour redonner la vie à ceux qui allaient en être privés par la faute d’un cœur trop fatigué ou d’un poumon trop faiblard, vie qui leur est involontairement donnée en cadeau par des têtes brulées qui ne réalisent pas la chance qu’elles ont d’être jeunes, en bonne santé et de pouvoir croquer la vie à belles dents, et qui décident un beau jour d’aplatir leur électroencéphalogramme pour une dose d’adrénaline dans un bolide à 8 cylindres.

J’ai eu la chance d’en réchapper, d’autres ne l’auront pas. Alors de grâce mes amis, prenez soin de ces cadeaux que sont votre jeunesse et votre santé, d’autres n’ont pas eu ces privilèges …

Un ex-jeune rescapé des kilomètres/heure

Let the board sound

Rabih

PS: cette histoire est purement fictive, toute ressemblance avec des personnes ou situations réelles est fortuite.

Was it really better before?

“Things were better before, man”…

I can see where you’re coming from dear friend. Indeed, the past decade or so has been everything but a walk in the park. Economic crisis, terrorism, natural disasters, outbreaks, you name it. Nostalgia aside, I guess however that you should measure the “better” part of your statement by the amount of time by which you define the “before” part of it.

Do you mean 5 years or so ago? Right in the middle of the Islamic State terrorist attacks in Europe.

10 years ago? You’re in the aftermath of the greatest economic crisis since the great depression and at the start of the Syrian conflict.

15 or 20 years ago? That’s 9/11 and the subsequent war on terrorism, Bush, Saddam, the Iraq conflict, the SARS outbreak, hurricane Katherina, the Y2K bug (or lack thereof).

More? 40, 50 years ago? The Cold War, the Berlin wall, apartheid. 80 years bring you back to a world conflict, a genocide and the first and last use of nuclear weapons in an armed conflict, 90 years, to the greatest economic depression in modern history, 100 years, to yet another world conflict and another genocide.

And before that? The Napoleonic wars, the Plague, the great fire of London, the fall of the Roman Empire, the fire of Rome, Nero, Attila the Hun, and many other wonderful humanist concepts like slavery or torture, which were the norm for a very long time. Just an excerpt of a very long list. Many things were not better before. Most actually. Human rights, gender equality, air conditioning and ice cream would only be coming later.

Robert, Hubert – Incendie à Rome

If you are still not convinced, picture this last argument: it took medicine thousands of years of trial and error, starting from basic herbal medicine in the bronze age to the discovery of penicillin by Sir Alexander Flemming in 1928 to start having effective and widespread antibiotics. Most people reading this post were born shortly after penicillin had become a staple of modern medicine and most will be gone by the time bacteria will have developed enough resistance to render most antibiotics ineffective. It is as if the entire universe aligned itself in order to make antibiotics available right in time for your birth dear friend and will retire them by the time you’re gone. A personal gift to you and you only, of all the people who walked the face of this earth since the dawn of time, emperors and prophets included. So no, things were not better before and the 20 years of extra life expectancy that this gift gave us is a testament to the brighter present we live in.

My point is, past is gone, future is still to be written, so there’s probably no better time for us than today, which is why I would like to wish you a nice today, a nicer tomorrow, and so on for the next year.

Let the board sound

And best wishes for the year to come

Rabih